La Fondation ARC pour la recherche sur le cancer lance une étude pionnière sur des vaisseaux sanguins tueurs de cancer afin de développer des méthodes de renforcement des défenses immunitaires existantes.
Jean-Philippe Girard, directeur de l’Institut de Pharmacologie et de Biologie Structurale de Toulouse, a pris la tête d’un projet d’étude visant les vaisseaux sanguins High endothelial venule (HEV), qui ont pour fonction d’acheminer spécifiquement les globules blancs du sang vers les tissus, notamment dans les tumeurs. Ils permettent ainsi d’acheminer des globules blancs T cytotoxiques (tueurs de cellules) au cœur des tumeurs cancéreuses. Ces derniers sont particulièrement présents dans les organes lymphoïdes (amygdales, ganglions notamment). Mais des médecins ont également pu observer leur apparition dans certaines tumeurs solides du sein – de la peau, des ovaires par exemple.
Il s’agit d’une nouvelle façon de penser, qui va à l’encontre de la doxa en cancérologie. « C’est un changement de dogme. Avant on disait : ‘les vaisseaux sanguins, c’est pas bon, car ça donne de la nourriture au cancer’. Ce que nous avons découvert, c’est qu’au niveau de la tumeur, tous les vaisseaux ne sont pas égaux. De ‘bons vaisseaux’ luttent contre le cancer », souligne le professeur Girard. « L’objectif de la nouvelle étude financée par la fondation Arc est d’identifier les molécules qui permettent de lutter contre le cancer en transformant des vaisseaux sanguins classiques en vaisseaux HEV », a détaillé le chercheur toulousain.
Les « vaisseaux HEV sont capables de recruter des lymphocytes ‘naïfs’, qui vont venir apprendre à éliminer la cellule cancéreuse » détaille le chercheur. « La survie à dix ans des patientes atteintes de cancer du sein monte à 80 % lorsque la tumeur présente de nombreux vaisseaux HEV, contre 50 % lorsque les vaisseaux HEV sont peu nombreux » note-t-il. Il s’agit donc de mettre au point une « protéine de synthèse » afin « d’éduquer des vaisseaux naïfs », d’étudier les voies d’administration, de tester les doses, ou encore de savoir à quelle fréquence le traitement doit être pris. Plusieurs molécules ont déjà été identifiées, qui devront être testées sur des animaux. Jean-Philippe Girard s’est accordé « cinq à dix ans » pour y parvenir.