Aux confins du désert de Gobi, au lieu-dit Wuwei (武威市), le Gouvernement populaire de la province du Gansu (1) (甘肃省), a annoncé en mai 2021 qu’il testera prochainement un réacteur avec une énergie nucléaire ayant un haut niveau de sûreté, de très faibles émissions de CO2, peu coûteuse, et qui n’aura pas besoin d’uranium et d’eau pour être refroidi. Il aura la particularité d’utiliser des sels fondus à la place de l’eau. Pour le développement de ce projet, le gouvernement Chinois a investi depuis dix ans, plus de 535 millions d’euros. La construction du site a commencé le 30 septembre 2018.
Ce réacteur nucléaire expérimental utilisera du thorium comme combustible. La Chine pourrait devenir le premier pays à avoir la possibilité de commercialiser cette technologie.
Une source pouvant alimenter en énergie l’humanité pour des dizaines de milliers d’années
Le thorium est un métal faiblement radioactif et présent naturellement dans les roches. Il est actuellement rarement utilisé dans l’industrie. Il s’agit d’un sous-produit de l’industrie minière croissante des terres rares en Chine. Il constitue donc une alternative très intéressante à l’uranium.
Selon le colauréat du prix Nobel de physique en 1984, Carlo Rubbia, la comparaison de l’énergie produite pour une tonne de fission de thorium équivaudrait à environ 200 tonnes d’uranium. Quand on sait que 7 grammes d’uranium équivalent à environ une tonne de charbon, une tonne de thorium permettrait de remplacer environ 28 millions de tonnes de charbon. En réfléchissant au succès potentiel de ce projet, on peut imaginer les futures tonnes de CO2 qui seront évitées pour gérer l’urgence climatique.
Une tonne de thorium représente une sphère d’environ 55 cm de diamètre. Un morceau de thorium de la taille d’environ une balle de tennis pourrait électrifier Londres pendant une semaine. Une tonne de thorium suffirait pour alimenter un réacteur à sels fondus qui produit 1000 MW d’électricité, pendant un an. Les réserves de thorium terrestres peuvent assurer les besoins énergétiques planétaires pendant des dizaines de milliers d’années.
Le thorium à un faible coût, environ 250 000 € la tonne, soit 0,029 €/MWh électrique. Comparativement à l’uranium, à environ 10 €/MWh électrique, le thorium reviendrait environ 350 fois moins cher au MWh électrique produit.
Il a également le potentiel de générer une quantité beaucoup plus faible de déchets radioactifs à très longue durée de vie que les réacteurs conventionnels. Le volume total pourrait être environ 35 fois inférieur à celui des réacteurs classiques pour produire la même quantité d’énergie. Les 99,99 % des déchets seraient stables en 300 ans, à la place de dizaines de milliers d’années pour les combustibles actuels.
Il y a un autre avantage : ce type de réacteur n’a pas besoin d’être construit à proximité des cours d’eau. Les sels fondus eux-mêmes servent de réfrigérant, contrairement aux centrales électriques conventionnelles à l’uranium qui ont besoin d’énormes quantités d’eau pour refroidir leurs réacteurs.
Par ce principe, les réacteurs peuvent être installés dans des régions isolées et arides, comme les déserts.
Par rapport aux réacteurs à eau des centrales nucléaires conventionnelles, les réacteurs à sels fondus peuvent fonctionner à des températures plus élevées.
Selon Nature.com, le réacteur chinois utilisera des sels à base de fluorure. Ils fondent en un liquide incolore et transparent lorsqu’ils sont chauffés à environ 450°C. Ce sel est l’équivalent d’un réfrigérant pour le cœur du réacteur.
De plus, plutôt que des barres de combustible solide, les réacteurs à sel fondu utilisent également le sel liquide comme substrat pour le combustible, tel que le thorium dissous directement dans le cœur.
Les réacteurs à sels fondus ont un très haut niveau de sûreté de fonctionnement. Le combustible est dissous dans un liquide et ces réacteurs fonctionnent à des pressions inférieures à celles des réacteurs nucléaires conventionnels.
Néanmoins, certains critiquent et affirment que la faisabilité des réacteurs à sel fondu reste discutable, car cela crée d’autres problèmes techniques à résoudre. À très haute température, le sel peut en effet corroder les structures du réacteur et il doit être protégé en conséquence.
La Chine pourrait faire prendre un tournant majeur à l’humanité
Le réacteur expérimental qui sera exploité par l’Institut de physique appliquée de Shanghai est conçu pour générer deux mégawatts d’énergie thermique. C’est suffisamment d’énergie pour électrifier environ 1000 foyers.
Si les expériences sont couronnées de succès, la Chine projette de construire un réacteur d’une capacité de 373 mégawatts d’ici 2030. Il pourrait électrifier des centaines de milliers de foyers.
Selon Jiang Kejun de l’Institut de recherche sur l’énergie de la Commission nationale du développement et de la réforme à Pékin, ce type de réacteur est l’une des « technologies parfaites » qui devraient aider la Chine à atteindre son objectif de « zéro émission » de carbone d’ici 2060.
Lorsque la Chine démarrera son réacteur pilote, ce sera le premier réacteur à sels fondus au thorium à fonctionner depuis 1969. À cette époque, des chercheurs américains ont fermé leur réacteur au Oak Ridge National Laboratory dans le Tennessee. Ce laboratoire était initialement prévu pour faire fonctionner le « Molten-salt Reactor Experiment » avec un mélange de thorium-232 et d’uranium-233, mais ce programme d’essais a été malheureusement annulé. Selon nature.com, les chercheurs qui ont collaboré au projet affirment que la conception chinoise copie celle d’Oak Ridge, mais l’améliore en faisant appel à des décennies d’innovation dans la fabrication, les matériaux et l’instrumentation.
Les réacteurs à sels fondus ne sont qu’une des nombreuses technologies nucléaires avancées dans lesquelles la Chine investit actuellement.
En 2002, un forum intergouvernemental a identifié six technologies de réacteurs prometteuses à accélérer d’ici 2030, y compris des réacteurs refroidis par des liquides au plomb ou au sodium. La Chine a des programmes de recherche et de développement pour chacun d’eux.
Alors que la Chine s’est fixé une neutralité carbone pour 2060, elle pourrait remplacer les chaudières de ses centrales électriques au charbon et au gaz actuelles, par des réacteurs nucléaires au Thorium.
En cas de succès, la chine envisage une production en série qui pourrait démarrer dès 2030.
Le réacteur chinois sera un magnifique banc d’essai et d’apprentissage sans précédent pour l’humanité. Il va sans doute nous permettre de découvrir de nouvelles données scientifiques qui pourront nous aider à construire des solutions humanistes et non idéologiques pour le futur.
Sortons de l’obscurantisme anti-nucléaire
Alors que l’Union européenne entre dans une crise énergétique majeure, elle ferait bien de relever la tête de l’obscurantisme antinucléaire.
Cette crise majeure trouve incontestablement ses fondations dans l’idéologie antinucléaire du passé et le retard à nucléariser et électrifier le plus possible un maximum de processus industriels et de biens utilisant des énergies fossiles.
Cet obscurantisme a retardé indéniablement la construction de nouvelles unités de production nucléaire en suffisance. Avec ces nouvelles constructions, l’Union européenne aurait été mieux protégée des augmentations financières des énergies fossiles devenues insupportables pour les citoyens en 2021. En l’absence de nouvelles constructions de centrales utilisant l’énergie nucléaire, les augmentations ne pourront que s’accentuer étant donné que les réserves exploitables des énergies fossiles ne pourront que diminuer.
Anticipons l’avenir, au même titre que les énergies fossiles sont venues remplacer les énergies moyenâgeuses comme les énergies éoliennes et solaires, l’énergie nucléaire doit venir remplacer les énergies fossiles pour les siècles futurs. Avec le développement des énergies nucléaires, les énergies fossiles deviendront des énergies moyenâgeuses pour les siècles futurs.
Notes :
(1) https://www.gswuwei.gov.cn/art/2021/5/19/art_174_317815.html
Sources :
- https://www.terraeco.net/Thorium-le-nucleaire-vert-existe-t,48079.html
- http://web-et-design.com/tpenucleaire/page2/styled-3/files/page4-cliquer-ici-pour-acce0301der-au-calcul.pdf
- https://urlzs.com/QYB4k
- https://www.nature.com/articles/d41586-021-02459-w
- https://fissionliquide.fr/2013/03/29/thorium-moins-cher-que-charbon/
- https://www.gswuwei.gov.cn/art/2021/5/19/art_174_317815.html
- https://wp.unil.ch/futurspossibles/2020/02/le-thorium-une-contribution-denergies-non-carbonees-au-climat/
- https://www.defi-energie.be/thorium-energie-propre/
Image par SnapLaunch de Pixabay
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La filière thorium est une chimère :
– il faut des quantités industrielles d’uranium enrichi ou de plutonium pour démarrer un réacteur au thorium (ce qu’évite soigneusement de dire l’auteur de l’article)
– le nucléaire, quelque soit la filière, est trop long à mettre en place, on n’a pas 15 ans pour construire et mettre en route de nouveaux réacteurs.
Écarter cette filière si rapidement alors que de nombreux experts y réfléchissent très sérieusement est très pessimiste ou représente un manque de volonté à trouver des solutions.
Voir à +- 45 min pour répondre à votre question, voir également à d’autres moment, il y a de nombreux sujets très intéressants qui sont abordés: https://youtu.be/M4MgLixMrz8