Le consensus national pro-éolien, présenté comme allant de soi, doit faire face à une fronde sérieuse qui oblige ses promoteurs, bien appuyés par les Pouvoirs Publics, à devoir recourir, les uns à l’argutie, les autres à davantage de coercition, pour imposer leurs stratégies. Les derniers masques tombent, laissant apparaître non des sourires mais bien des rictus, car l’inquiétude est tangible. Hélas, il en faudra plus pour que le doute s’installe vraiment et pour réussir à entraver cette machine infernale, qui, en France, sévit sans légitimité. D’autres choix énergétiques avaient été faits dans le passé, qui gardent toute leur pertinence, répondant bien aux challenges actuels et rendant inutile cette politique politicienne de développement des éoliennes, à outrance (les mots ont un sens).
Le nucléaire se découvre ennemi du climat
Même si on assiste actuellement à un sensible, mais fragile, retournement de tendance (0), le nucléaire reste en butte à d’incessantes attaques, une crainte, voire une rancune, sont entretenues par la diffusion régulière d’émissions, voire de séries, qui remémorent les accidents emblématiques (Tchernobyl, Fukushima).
L’atome est au mieux perçu dans notre société, comme un mal nécessaire, avec en aval, toutes une palette de déclinaisons négatives, jusqu’à la phobie absolue, celle des écologistes dont c’est un trait identitaire.
A regarder le résultat des dernières élections municipales, les Verts semblent avoir le vent en poupe…et ça tombe bien pour eux, car le déploiement des éoliennes (et des panneaux PV), conférerait, selon ses tenants, et entre autres vertus, la capacité de faire reculer l’atome honni.
Un filon conjoncturel à exploiter sans modération et d’ailleurs, une vingtaine d’associations, organisations et collectifs (dont Greenpeace, Alternatiba, Les Amis de la Terre France, ANV-COP21 ou Attac France,…) viennent de signer une tribune : « Lutter pour le climat, c’est combattre le nucléaire » (1). arguant, in fine, que : « …les dizaines de milliards investis dans le nucléaire ne le seront pas dans les énergies renouvelables ou la rénovation thermique des bâtiments : le nucléaire verrouille toute possibilité d’une transition énergétique systémique, alors que des scénarios avec 100 % d’énergies renouvelables sont crédibles ; même l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et le Réseau de transport d’électricité (RTE) le disent dans leur dernier rapport ».
En Allemagne, un des arguments favoris des Grünens était que le courant nucléaire saturait le réseau empêchant le courant vertueux de s’y déverser.
Martingale douteuse
Las, pour ces « refuzniks du nucléaire » prêts à faire flèche de tout bois, les choses ne se déroulent pas exactement selon ce schéma idéal, car ces mats géants, qui poussent partout, ne sont pas seulement regardés, loin s’en faut, comme des lances qu’on peut briser contre l’atome.
Même si la plupart des oppositions sont d’abord celles des riverains refusant les nuisances visuelles et sonores, c’est pour ces plaignants, au-delà du prime-souhait qu’on implante les mats ailleurs, l’occasion de s’interroger, trop rarement hélas, sur le pourquoi de ces déploiements.
Certes leurs oreilles, pas encore assourdies par les sons et les infrasons des moulins, sont déjà rebattues par la propagande pro-EnRs, vantant le salut durable qu’elles apportent à la planète, en valorisant une ressource naturelle et inépuisable.
Pour certains, la quête s’arrête là, les mots lourds précédents répondant à leurs interrogations, pour d’autres, ayant poussé la porte, ils veulent en profiter pour visiter la maison, ils ne seront pas déçus !
Contreventements
De nombreuses associations de défense se sont créées localement et parmi elles beaucoup se sont regroupées dans des structures nationales, mais elles ont fort à faire, d’autant que les possibilités de recours déjà limitées ont été récemment encadrées par des évolutions législatives (2) visant à contraindre fortement les requérants, en limitant les leviers activables, en compressant les délais et en spécifiant les modes opératoires.
Pratiques particulièrement dissuasives, certaines parties plaignantes déboutées se sont même retrouvées devoir payer des dommages et intérêts exorbitants (pour compenser le manque à gagner du aux délais d’instruction), les juridictions n’ayant pas reconnu leur intérêt à agir, alors qu’on détruit des cadres de vie !
Le nouveau cadre législatif est tel, qu’à de rares exceptions près, quand l’outrance est manifeste, les plaignants peuvent juste espérer différer de quelques mois l’installation des machines, lesquelles finissent toujours par être construites et mises en service, l’image du pot de fer contre le pot de terre s’imposant.
Curieusement l’indignation des Verts, si prompts à traquer l’injustice et le recul des libertés, s’exerce là en mode mineur.
Pour mémoire, la PPE stipule qu’au-delà des 8000 mats existants, 6500 devront être implantés d’ici 2028, et le parlement débat actuellement sur les modalités de répartition de ce « porc-épic » entre les régions françaises.
Frondes bienvenues
Récemment sur un front, certes combatif mais qui, compte tenu de la situation, se ressent dos au mur, des contre-offensives ont été lancées.
La harangue de Stéphane Bern parue dans le Figaro : « Madame Pompili, les éoliennes sont une négation de l’écologie! », a reçu un très large écho dans les différents media. Prenant sa mission au pied de la lettre, il s’est élevé contre une forme de destruction du patrimoine national, due à la prolifération des mats et à leur implantation sauvage, mais au-delà, il s’est aussi intéressé au pourquoi de cette prolifération. La Ministre interpellée a dû allumer en hâte un contre-feu, sous la forme d’une circulaire à destination des Préfets, rappelant les arguments à faire valoir face aux opposants, l’Administration déjà largement juge et partie, ne s’en cachant même plus. Cette circulaire a d’ailleurs été immédiatement attaquée devant le Conseil d’Etat, par les associations anti-éoliennes.(3).
Parallèlement est sorti sur Internet, un film documentaire « Les éoliennes, du rêve à la réalité » dans lequel s’expriment des personnalités du monde industriel et économique, et qui décrit par le menu les arcanes d’un processus devenu depuis longtemps une machine à cash, la protection du climat n’étant qu’un sésame brandi pour forcer les réticences.
Tant l’article de Stéphane Bern que le film précité, sont devenus viraux (suivant l’expression consacrée), faisant souffler un vent frais sur un paysage déjà combatif, mais tellement contraint, un vent qui certes ne fera guère tourner les moulins, mais, évitera peut-être que d’autres ne poussent inconsidérément.
Dénigrements malaisés
Les cerbères de la réaction, contre le convoi du progrès, une variante de l’adage « les chiens aboient, la caravane passe », c’est ainsi que les tenants de l’éolien ont prétendu regarder les frondes précitées.
D’autres encore ont voulu comparer ces actions aux piqures qu’inflige la mouche aux chevaux du coche dans la célèbre fable (l’insecte se prévalant ingénument d’avoir stimulé l’attelage, arrivé finalement au sommet de la côte).
L’image ne vaut qu’en la transposant, le train de la modernité renouvelable gravissant les rampes (grâce à l’inertie conférée par l’acceptation sociétale et les efficaces garde-fous juridiques), malgré des manœuvres dilatoires, tentatives forcément illusoires (assimilées à des bourdonnements, certes audibles, mais sans effet).
Pourtant, même si les pro-éoliens (s’appuyant sur des sondages) peuvent se prévaloir d’une tolérance globale, la société regimbe, comme le montrent les nombreuses actions intentées contre les projets d’implantation, péril qu’il a fallu conjurer, en changeant la loi, excusez du peu. De même les récentes interventions médiatiques précitées ont obligé, en hâte, le Ministère de l’Ecologie à durcir l’attitude de l’Administration.
En février 2020, le Président avait déclaré entendre les protestations contre l’extension irrespectueuse des mats « on ne fait pas de l’écologie contre les gens » avait même ajouté Elisabeth Borne, la Ministre alors en charge, des propos qui avaient suscité de l’espoir chez les riverains concernés, mais aussi provoqué l’inquiétude de la filière. Laquelle filière a dû réagir efficacement en sous-main, puisque appliquant une nouvelle fois le principe du « en même temps » l’Exécutif a laissé les processus se dérouler, plus dynamique encore.
En 1970, le Président Pompidou avait constaté qu’au nom d’une sécurité routière mal appréhendée, on coupait systématiquement les arbres au bord des routes ; il s’en était ému et son injonction (par une lettre comminatoire au Premier ministre) avait été suivie des faits, une ère bien révolue. Mais Georges Pompidou est aussi celui qui a donné l’impulsion décisive au programme nucléaire national : décidément « nobody is perfect ».
(0) Campagne de PNC-France (Patrimoine Nucléaire et Climat) auprès des candidats aux élections régionales, Editorial dans Marianne (Natacha Polony 27 05), Editorial dans le Point (Géraldine Woesner 28 05), Déclaration à l’Express (Nicolas Bouzou 09 06), Déclaration de Xavier Bertrand (11 06) lors du débat LCI sur les élections régionales (Hauts de France).
(1) Magie des mots : il se trouve que c’est l’affirmation symétrique qui ferait sens : « lutter pour le nucléaire, c’est combattre la dérive du climat ».
(2) Décrets « Lecornu / de Rugy » n°2017- 1217 du 24 décembre 2018 et n°2017-1217 du 24 décembre 2018.
Ces textes d’exception constituent en effet une régression historique du droit français de l’environnement protégeant les citoyens :
- · en supprimant le double degré de juridiction dans le contentieux éolien ;
- · en réduisant à 15 jours le délai d’étude des projets éoliens par l’administration ;
- · en remplaçant les enquêtes publiques par une simple participation par voie électronique pour toutes les Installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et notamment les éoliennes.
(3) Le lundi 28 janvier 2019, la Fédération Environnement Durable, Vent de Colère!, Vieilles Maisons Françaises, Patrimoine Environnement et Sites & Monuments ont déposé devant le Conseil d’État deux requêtes en annulation pour excès de pouvoir
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