Des scientifiques ont « systématiquement trouvé du microplastique » dans les grands fleuves européens.
Après six mois à sillonner les grands cours d’eau européens, la goélette scientifique Tara de la fondation Tara Océan, a dévoilé ce samedi ses premières conclusions sur les prélèvements d’eau effectués sur le continent. Les résultats de cette étude sont peu encourageants : « 100% des prélèvements d’eau effectués dans les neuf fleuves européens contenaient des microplastiques », indique la fondation.
Ces travaux, menés en collaboration avec 17 laboratoires de recherche sous l’égide du CNRS, ont été menés « au large des neuf estuaires, à leur embouchure, en aval et en amont de la première grande ville à forte population située sur les fleuves », selon un communiqué de presse. Elle vise à identifier les sources de pollution, comprendre la fragmentation des microplastiques, leur dispersion vers l’océan, leurs impacts sur la biodiversité marine et leurs effets sur la chaîne alimentaire.
Les scientifiques ont ainsi prélevé des échantillons dans la Tamise, l’Elbe, le Rhin, la Seine, l’Ebre, le Rhône, le Tibre, la Garonne et la Loire entre mai et novembre. Ils y ont trouvé quantité de microbilles présentes dans certains cosmétiques et des dentifrices, mais surtout des minuscules fragments de moins de cinq millimètres. « Ces microplastiques représenteraient plus de 90% des 5.000 milliards de morceaux de plastiques flottant à la surface de nos océans » précise l’étude.
L’omniprésence de ces microplastiques est problématique, comme ces résidus contiennent « des polluants présents dans les fleuves (pesticides, hydrocarbures, métaux lourds…) et peuvent avoir des effets toxiques sur les organismes qui les ingèrent, ralentissant leur croissance, leur reproduction, en perturbant leur métabolisme et leur système hormonal », soulignent les 47 chercheurs qui se sont succédés à bord le temps de l’étude.
Les plastiques agissent comme de véritables aimants à contaminants. « Ces polluants n’aiment pas l’eau, c’est pourquoi ils sont attirés par les particules de plastique, à la façon de deux gouttes d’huile placées dans l’eau », observe Leila Meistertzheim, une biologiste qui a participé à l’étude. « Nous allons désormais caractériser tous ces polluants, mais il s’agit généralement de pesticides, d’hydrocarbures et de métaux lourds »
« C’est assez dramatique », a réagi Jean-François Ghiglione, directeur de recherche au laboratoire d’océanologie de Banyuls-sur-mer. Quant aux solutions, l’équipe a relevé que 80% de ces déchets plastiques proviennent de la terre. « Les solutions contre cette hémorragie sont définitivement à terre », explique donc Romain Troublé, de Tara Océan. La fondation plaide pour une meilleure collecte et recyclage des déchets, une réduction des plastiques à usage unique, des résines et additifs utilisés.
Certaines solutions sont déjà étudiées au niveau européen : l’Union européenne, deuxième plus gros pollueur après l’Asie selon Tara, interdira l’usage de certains objets en plastique à usage unique en 2021.
Depuis dix ans, la fondation étudie les déchets plastiques et microplastiques dans les mers et les océans.