Le journaliste Guillaume Pitron vient de publier un livre, La guerre des métaux rares, qui se penche sur la question des « métaux rares » – ces matériaux nécessaires à la fabrication des produits high- tech. Un ouvrage qui fait le point sur « la face cachée » de la transition énergétique et numérique.
Transition énergétique, révolution numérique, voilà des concepts qui sont apparus dans nos vies et ont bouleversé nos quotidiens, si bien qu’ils semblent familiers. Pourtant, ce grand bouleversement garde bien des secrets pour le grand public – des secrets qu’entend exposer le journaliste spécialisé Guillaume Pitron dans un livre édifiant sur « la face cachée » de la révolution verte et numérique. Inquiétées par le débat autour des conséquences des énergie fossiles sur notre environnement, nos sociétés ont cherché une alternative plus respectueuse de l’environnement – le recours aux éoliennes, panneaux solaires, aux véhicules électriques –, une « mystification » pour l’auteur.
Dans La guerre des métaux rares (Les Liens qui Libèrent), l’auteur souligne les paradoxes d’une transition énergétique et numérique « pensée hors sol ». Ainsi, on ignore largement que la production des outils de ces « green-tech » créé une nouvelle dépendance : celle aux métaux rares, « aussi discrets qu’indispensables ». Graphite, cobalt, indium, platinoïdes, tungstène… on les retrouve dans les batteries des voitures électriques, dans les éoliennes, les panneaux solaires, les smartphones, nos ordinateurs, tablettes et autre objets connectés de notre quotidien. Le rôle croissant qu’ils sont amenés à occuper dans nos sociétés leur a valu le surnom de « pétrole » du XXIème siècle.
Il est trop souvent omis que l’extraction de ces métaux rares est extrêmement polluante. Les pays occidentaux ont pu ignorer ce phénomène, les exploitations minières d’extraction et de raffinage de ces matières premières étant délocalisées – majoritairement en Asie. Le livre est sans appel sur les conséquences environnementales de ces exploitations : « Notre quête d’un modèle de croissance plus écologique a plutôt conduit à l’exploitation intensifiée de l’écorce terrestre pour en extraire le principe actif, à savoir les métaux rares, avec des impacts environnementaux encore plus importants que ceux générés par l’extraction pétrolière. »
Le livre sonne aussi le tocsin à propos de la grande dépendance dans laquelle nous nous plaçons par rapport aux pays détenteurs et exploitant ces minéraux – la Chine en tête, qui « développe une impressionnante stratégie à long terme », en Afrique notamment. Ainsi, nous perdons le contrôle sur la production de nos équipements les plus sophistiqués (civils et militaires). « En engageant l’humanité entière dans la quête de métaux rares, la transition énergétique et numérique va assurément aggraver les dissensions et les discordes. Loin de mettre un terme à la géopolitique de l’énergie, elle va au contraire l’exacerber », estime Guillaume Pitron.
Guillaume Pitron est un journaliste spécialiste de la géopolitique des matières premières pour Le Monde Diplomatique, Géo ou National Geographic. Il intervient régulièrement auprès du parlement français et de la Commission européenne.
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