Le gazoduc Midi-Catalogne fait face à un revers probablement final, alors que les régulateurs de l’énergie français et espagnols s’opposent au projet.
Le projet de gazoduc reliant la France et l’Espagne pourrait bien être dans l’impasse. Les régulateurs de l’énergie français et espagnols ont annoncé mardi 22 janvier qu’ils refusaient d’accorder une autorisation au South Transit East Pyrenees (STEP), première phase du projet d’interconnexion gazière MidCat (Midi-Catalogne). Les deux agendes ont estimé que ce projet ne présente pas un « rapport coûts-bénéfices clair et positif » au sein du marché, compte tenu du « rôle futur du gaz dans la région, à la suite de l’adoption récente du paquet énergie propre en Europe ».
« La CRE [française] et la CNMC [espagnole] considèrent que le projet STEP ne répond pas aux besoins du marché et ne présente pas une maturité suffisante pour pouvoir faire l’objet d’une décision favorable des régulateurs et, a fortiori, pour faire l’objet d’une décision de répartition transfrontalière des coûts » explique un communiqué. De fait ; ml’abandon de Step complique énormément les choses pour les partisans du MidCat, et beaucoup voient ce désaveu comme un coup fatal pour le gazoduc devant relier Martorell (ville située à 35 km au sud de Barcelone) et la ville française Figueres.
Ce projet, pensé en 2011, alors même que le Président russe Vladimir Poutine menaçait de couper le robinet de gaz en plein milieu de l’hiver, visait à renforcer l’indépendance énergétique des pays européens. « Il faut absolument envoyer un message clair de la volonté de l’Europe de réduire rapidement sa dépendance énergétique, spécialement vis-à-vis de la Russie », avait alors prévenu Herman Van Rompuy, Président du Conseil européen de l’époque. Or, l’Espagne est elle-même reliée deux gazoducs connectés à l’Algérie (un important fournisseur de gaz naturel).
A l’époque, la Chancelière allemande Madame Merkel soutenait également ce projet : « On n’a pas suffisamment raccordé (l’Europe) au reste du marché de l’énergie européen. Il faut progresser dans ce sens », notait-elle. « Une interconnexion directe avec un pays producteur, c’est une garantie de sécurité. Sans compter que son tarif est plus bas » s’enthousiasmait alors l’association Sedigas, un lobby favorable au développement du marché du gaz naturel. Le projet n’enchantait en revanche pas les associations de défense de l’environnement – loin s’en faut.
« Cette décision des autorités françaises et espagnoles est bien le signe que cette liste de projets, soi-disant d’intérêt commun, reflète plutôt les intérêts des lobbies que celui des populations concernées. Or, c’est sur cette base que sont accordés des financements publics », a réagi Cécile Marchand, chargée de campagne aux Amis de la Terre – une des nombreuses associations à avoir déposé des recours visant à bloquer ce projet. Dans tous les cas, ce revirement est une illustration des changements de politique induits par l’adoption de l’Accord de Paris.