
À partir de l’été 2025, les agents publics du Schleswig-Holstein, au nord de l’Allemagne, cesseront progressivement d’utiliser les logiciels de Microsoft dans leurs fonctions. Objectif affiché : reprendre le contrôle sur les données, garantir leur traitement selon le droit européen et réduire la dépendance à l’égard des géants technologiques américains.
Le ministre régional de la Numérisation, Dirk Schrödter, a confirmé que près de 30 000 fonctionnaires — bientôt rejoints par quelque 30 000 enseignants — abandonnent Teams, Outlook, Word ou encore Excel au profit de solutions open source comme LibreOffice, Open-Xchange ou encore Linux. La suite du programme prévoit également un transfert vers une infrastructure cloud publique allemande, hors de contrôle de Microsoft.
Cette décision s’inscrit dans un contexte de méfiance croissante à l’égard des multinationales américaines du numérique, et de prise de conscience des « dépendances numériques », selon les mots du ministre. En 2023, l’Union européenne avait ouvert une enquête antitrust visant Microsoft, en raison de la manière dont l’entreprise lie Teams à ses autres logiciels professionnels.
En réponse à cette pression politique et réglementaire, Microsoft a annoncé une série de nouveaux produits conçus pour répondre aux exigences européennes en matière de souveraineté. Sa nouvelle offre « Sovereign Public Cloud », disponible d’ici fin 2025, garantit que les données restent physiquement en Europe, sous le droit européen, avec des accès contrôlés uniquement par du personnel résidant dans l’UE. L’entreprise propose aussi que certaines applications, comme Exchange et SharePoint, puissent être gérées directement dans les centres de données des clients.
Microsoft insiste sur le fait que cette offre vise « les gouvernements, les industries critiques et les secteurs réglementés » nécessitant « le plus haut niveau d’autonomie opérationnelle ». Une manière pour l’entreprise de répondre aux critiques qui visent le Cloud Act américain, une loi qui permet aux autorités des États-Unis d’exiger l’accès aux données, y compris lorsqu’elles sont stockées hors du territoire américain.
En Europe, plusieurs voix s’élèvent pour accélérer la construction d’une infrastructure numérique indépendante. La France pousse en faveur d’une capacité européenne propre, et des villes comme Copenhague et Aarhus, au Danemark, étudient également un passage à l’open source. Le Schleswig-Holstein espère ainsi devenir un modèle pour d’autres administrations. Quant à Microsoft, il s’efforce d’adapter son modèle à un continent de plus en plus soucieux de sa souveraineté numérique.
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